Parlons blogs et livres, et livres de blogs, à cause de Chevillard.
L'émotion rare
Le 8 décembre 2009, Éric Chevillard publie sur son autofictif :
Il m'arrive d'être de ces lecteurs-là. De manière récurrente pour Jean Echenoz, Marie NDiaye ou Patrick Modiano. Cette liste ne vous étonne pas, j'en parlais ici. Et parfois pour quelques autres. Une fois achetés, il peut se passer quelques mois avant que je n'ouvre ces livres. Mais il me les faut rapidement, parfois même le jour de parution. Je n'explique pas cet étrange manie, certainement pas par la crainte d'une rupture de stock. Notez que, étrangement, quand vous allez le jour de parution d'un livre de Jean Echenoz dans une Fnac (ou un Virgin), vous avez la surprise qu'on vous réponde qu'il n'est pas encore disponible. À l'inverse, pour la sortie d'un tome d'Harry Potter, des ouvertures exceptionnelles étaient organisées à minuit le jour J. Pourtant, Harry Potter n'est pas publié chez Minuit, contrairement à Echenoz !
Revenons à Éric Chevillard. Au-delà de l'appel à la consommation (il sort deux livres en janvier) et au besoin légitime de tout écrivain de gagner de l'argent, j'ai la faiblesse de croire qu'il est sérieux lorsqu'il parle de cette émotion rendue plus rare.
Alors quoi, vais-je acheter les livres d'Éric Chevillard ? Le Normand que je demeure sera fidèle aux clichés : oui et non. Oui, le 14 janvier, j'achèterai son livre Choir. Parce que les premières pages m'ont convaincu.
Non, le 20 janvier, je n'achèterai pas la saison 2 de l'Autofictif, pour deux raisons. Premièrement parce que le 20 janvier je serai à New York (au Krispy Kreme, au Burger King, ou ailleurs), deuxièmement pour ce que je vais évoquer maintenant.
Livres de blogs
Pour moi, tenir un blog, fût-il littéraire, ce n'est pas écrire un livre.
C'est le cas de l'Autofictif. Chaque jour je me régale du tryptique, adapté au format blog, à l'actualité, mais il me semble qu'il perd de son intérêt passé au format livre. Surtout qu'il n'y a aucun travail d'édition, à savoir de tri, de correction, comme je l'ai déjà indiqué sur ce blog. La deuxième saison de l'Autofictif sort en livre, sous le titre l'Autofictif voit une loutre, le 20 janvier, chez l'Arbre vengeur.
C'est pour exactement les mêmes raisons que je ne sortirai pas les 807 en livre. On me l'a proposé, j'y ai beaucoup réfléchis, pensé à différentes options. Mais sortir les 807 en livre impliquerait un vrai travail d'édition, pour un résultat incertain. Qui achèterait un tel livre ? En vendrait-on 807 exemplaires à 8,07 euros ? Tiens, j'aimerais bien savoir combien l'Arbre vengeur a vendu d'exemplaires de l'Autofictif, certainement assez pour sortir la saison 2. De plus, l'intérêt de cette aventure 807 reste la diversité des participants, avec leur richesse et leur faiblesse, sélectionner certains 807 ou auteurs diminuerait cette diversité. Et comment être à la fois juge et partie, je fais partie de ceux qui ont écrit le plus de 807.
Il existe maintenant un mot un peu barbare pour désigner les livres issus d'un blog : blook (initié par Tony Pierce). Il existe même un prix du blook. Encore un mot inutile. Si ledit blook n'est qu'une suite d'élucubrations, qu'un journal intime, de l'autofictif à la Angot, le blook lui-même est inutile. Si le blook a été conçu comme un livre avec édition et corrections, alors c'est un livre, qu'importe si le brouillon était un blog ou du papier griffonné sur le bureau de l'auteur.
Enfin, laissons l'écriture bloguesque aux blogs.
Soyons juste, parfois, en ouvrant un livre, on se dit qu'une version blog aurait grandement suffi. C'est ce que je me suis dit encore aujourd'hui (enfin, hier, vu l'heure) en feuilletant le livre d'Anne Brochet, Un tour en ville, chez mon libraire. Des photos, de maigres textes. Je n'ai pas encore lu de livres d'Anne Brochet dont j'ai entendu plutôt de bons échos. Mais là, ce tour en ville, ne valait pas un livre, alors qu'en blog cela aurait pu donner quelque chose d'intéressant.
Notons ce qui reste pour moi la seule expérience intelligente autour des livres et des blogs, le livre de Roxane Duru, Petits pains au chocolat (Stéphane Million Éditeur). Elle a écrit son premier roman en utilisant les éléments d'un blog : posts et commentaires. On y trouve, comme un journal, par date des états d'âme, événements de la narratrice. Mais suivis de commentaires sous pseudo, avec souvent réponse de la narratrice. J'ai trouvé l'idée intelligente donc, un vrai style, mais je n'ai pas aimé. Je n'ai pas aimé parce que je me suis senti vieux, loin de ses états d'âme, du côté autofictif, de son style aussi.
Les jeunes s'y retrouvent certainement, les vieux cons comme moi pas du tout. Un article ici pour en savoir plus.
Liens bloguesques
On me demande pourquoi je ne mets pas tous mes amis dans la liste blogs sur le côté.
C'est vrai, il n'y a pas Georges Flipo, Gaëlle Pingault, Manu Causse, Joachim Séné, Jean Prod'hom, Emmanuelle Urien... (liste non exhaustive). Bah, la raison est simple, ne figurent que les blogs où on peut me lire (Mot Compte Double, Magali Duru, Calipso) ou entendre (Page 48), ou que j'ai créé (Les 807).
J'ajoute deux nouveaux liens, Les Chevaliers des touches, le blog que Martin Winckler a ouvert pour les écrivants, vous pouvez y lire un de mes textes sur le besoin d'écrire (vous avez le droit de ne pas être d'accord) et le Cabinet des curiosités d'Éric Poindron qui a relayé les 807, avec certains de mes messages, et dernièrement il a publié mes réponses à un questionnaire loufoque. J'espère qu'en lisant mes réponses vous vous amuserez autant que moi en les écrivant. C'est du blog, alors j'y ai recyclé du Chevillard. Je vous encourage à répondre à votre tour...
Je fréquente régulièrement ces blogs amis, et d'autres (La République des livres). J'en profite pour signaler le retour de Stéphane Laurent. On se connaît (virtuellement) depuis un bail, depuis l'époque où il avait créé un forum sur les concours de nouvelles. Je partage souvent ce qu'il écrit.
Alors la raison pour laquelle je le lis c'est surtout pour la façon dont il le dit ! Pas de demi-mesure chez Stéphane, parfois de la mauvaise foi (assumée) mais surtout une réelle passion pour la littérature.
Ça se termine
Eh oui, 2009 se termine, je vous souhaite de bonnes fêtes et de bons livres au pied du sapin. Pour commencer 2010, je vous prépare deux pastiches (Laurent Mauvignier pour une histoire de pancakes pour changer des doughnuts et Éric Faye pour une fièvre sexuelle), une seconde traduction en anglais et je vous parlerai de ce recueil de nouvelles collectif qui sortira pour le Salon (du livre de Paris, clin d'œil à Georges) à l'Atelier du Gué avec un de mes textes illustré par l'École Estienne.
Allez, à l'année prochaine !
Note du 28 décembre 2009 : le titre initial de ce billet était affreux, je le change pour du moins pire.
L'émotion rare
Le 8 décembre 2009, Éric Chevillard publie sur son autofictif :
Il est évident que le lecteur qui achète aujourd’hui un livre dès sa parution plutôt que d’attendre de le trouver d’occasion ou plus tard éventuellement en édition de poche, plutôt encore que de l’emprunter en bibliothèque – et quoi que l’on pense par ailleurs de ces usages certainement justifiés – fait montre envers l’auteur d’une attention (d’une prévenance, d’une délicatesse) qui est en passe de devenir pour celui-ci une émotion rare.
Il m'arrive d'être de ces lecteurs-là. De manière récurrente pour Jean Echenoz, Marie NDiaye ou Patrick Modiano. Cette liste ne vous étonne pas, j'en parlais ici. Et parfois pour quelques autres. Une fois achetés, il peut se passer quelques mois avant que je n'ouvre ces livres. Mais il me les faut rapidement, parfois même le jour de parution. Je n'explique pas cet étrange manie, certainement pas par la crainte d'une rupture de stock. Notez que, étrangement, quand vous allez le jour de parution d'un livre de Jean Echenoz dans une Fnac (ou un Virgin), vous avez la surprise qu'on vous réponde qu'il n'est pas encore disponible. À l'inverse, pour la sortie d'un tome d'Harry Potter, des ouvertures exceptionnelles étaient organisées à minuit le jour J. Pourtant, Harry Potter n'est pas publié chez Minuit, contrairement à Echenoz !
Revenons à Éric Chevillard. Au-delà de l'appel à la consommation (il sort deux livres en janvier) et au besoin légitime de tout écrivain de gagner de l'argent, j'ai la faiblesse de croire qu'il est sérieux lorsqu'il parle de cette émotion rendue plus rare.
Alors quoi, vais-je acheter les livres d'Éric Chevillard ? Le Normand que je demeure sera fidèle aux clichés : oui et non. Oui, le 14 janvier, j'achèterai son livre Choir. Parce que les premières pages m'ont convaincu.
Non, le 20 janvier, je n'achèterai pas la saison 2 de l'Autofictif, pour deux raisons. Premièrement parce que le 20 janvier je serai à New York (au Krispy Kreme, au Burger King, ou ailleurs), deuxièmement pour ce que je vais évoquer maintenant.
Livres de blogs
Pour moi, tenir un blog, fût-il littéraire, ce n'est pas écrire un livre.
C'est le cas de l'Autofictif. Chaque jour je me régale du tryptique, adapté au format blog, à l'actualité, mais il me semble qu'il perd de son intérêt passé au format livre. Surtout qu'il n'y a aucun travail d'édition, à savoir de tri, de correction, comme je l'ai déjà indiqué sur ce blog. La deuxième saison de l'Autofictif sort en livre, sous le titre l'Autofictif voit une loutre, le 20 janvier, chez l'Arbre vengeur.
C'est pour exactement les mêmes raisons que je ne sortirai pas les 807 en livre. On me l'a proposé, j'y ai beaucoup réfléchis, pensé à différentes options. Mais sortir les 807 en livre impliquerait un vrai travail d'édition, pour un résultat incertain. Qui achèterait un tel livre ? En vendrait-on 807 exemplaires à 8,07 euros ? Tiens, j'aimerais bien savoir combien l'Arbre vengeur a vendu d'exemplaires de l'Autofictif, certainement assez pour sortir la saison 2. De plus, l'intérêt de cette aventure 807 reste la diversité des participants, avec leur richesse et leur faiblesse, sélectionner certains 807 ou auteurs diminuerait cette diversité. Et comment être à la fois juge et partie, je fais partie de ceux qui ont écrit le plus de 807.
Il existe maintenant un mot un peu barbare pour désigner les livres issus d'un blog : blook (initié par Tony Pierce). Il existe même un prix du blook. Encore un mot inutile. Si ledit blook n'est qu'une suite d'élucubrations, qu'un journal intime, de l'autofictif à la Angot, le blook lui-même est inutile. Si le blook a été conçu comme un livre avec édition et corrections, alors c'est un livre, qu'importe si le brouillon était un blog ou du papier griffonné sur le bureau de l'auteur.
Enfin, laissons l'écriture bloguesque aux blogs.
Soyons juste, parfois, en ouvrant un livre, on se dit qu'une version blog aurait grandement suffi. C'est ce que je me suis dit encore aujourd'hui (enfin, hier, vu l'heure) en feuilletant le livre d'Anne Brochet, Un tour en ville, chez mon libraire. Des photos, de maigres textes. Je n'ai pas encore lu de livres d'Anne Brochet dont j'ai entendu plutôt de bons échos. Mais là, ce tour en ville, ne valait pas un livre, alors qu'en blog cela aurait pu donner quelque chose d'intéressant.
Notons ce qui reste pour moi la seule expérience intelligente autour des livres et des blogs, le livre de Roxane Duru, Petits pains au chocolat (Stéphane Million Éditeur). Elle a écrit son premier roman en utilisant les éléments d'un blog : posts et commentaires. On y trouve, comme un journal, par date des états d'âme, événements de la narratrice. Mais suivis de commentaires sous pseudo, avec souvent réponse de la narratrice. J'ai trouvé l'idée intelligente donc, un vrai style, mais je n'ai pas aimé. Je n'ai pas aimé parce que je me suis senti vieux, loin de ses états d'âme, du côté autofictif, de son style aussi.
Les jeunes s'y retrouvent certainement, les vieux cons comme moi pas du tout. Un article ici pour en savoir plus.
Liens bloguesques
On me demande pourquoi je ne mets pas tous mes amis dans la liste blogs sur le côté.
C'est vrai, il n'y a pas Georges Flipo, Gaëlle Pingault, Manu Causse, Joachim Séné, Jean Prod'hom, Emmanuelle Urien... (liste non exhaustive). Bah, la raison est simple, ne figurent que les blogs où on peut me lire (Mot Compte Double, Magali Duru, Calipso) ou entendre (Page 48), ou que j'ai créé (Les 807).
J'ajoute deux nouveaux liens, Les Chevaliers des touches, le blog que Martin Winckler a ouvert pour les écrivants, vous pouvez y lire un de mes textes sur le besoin d'écrire (vous avez le droit de ne pas être d'accord) et le Cabinet des curiosités d'Éric Poindron qui a relayé les 807, avec certains de mes messages, et dernièrement il a publié mes réponses à un questionnaire loufoque. J'espère qu'en lisant mes réponses vous vous amuserez autant que moi en les écrivant. C'est du blog, alors j'y ai recyclé du Chevillard. Je vous encourage à répondre à votre tour...
Je fréquente régulièrement ces blogs amis, et d'autres (La République des livres). J'en profite pour signaler le retour de Stéphane Laurent. On se connaît (virtuellement) depuis un bail, depuis l'époque où il avait créé un forum sur les concours de nouvelles. Je partage souvent ce qu'il écrit.
Alors la raison pour laquelle je le lis c'est surtout pour la façon dont il le dit ! Pas de demi-mesure chez Stéphane, parfois de la mauvaise foi (assumée) mais surtout une réelle passion pour la littérature.
Ça se termine
Eh oui, 2009 se termine, je vous souhaite de bonnes fêtes et de bons livres au pied du sapin. Pour commencer 2010, je vous prépare deux pastiches (Laurent Mauvignier pour une histoire de pancakes pour changer des doughnuts et Éric Faye pour une fièvre sexuelle), une seconde traduction en anglais et je vous parlerai de ce recueil de nouvelles collectif qui sortira pour le Salon (du livre de Paris, clin d'œil à Georges) à l'Atelier du Gué avec un de mes textes illustré par l'École Estienne.
Allez, à l'année prochaine !
Note du 28 décembre 2009 : le titre initial de ce billet était affreux, je le change pour du moins pire.