Puisque nous sommes entre nous, je vais vous avouer une faiblesse : je suis un fan de Patrick Modiano, Jean Echenoz et Marie NDiaye. Merci de ne pas le répéter.
Snob avant tout
Aimer un écrivain qui a obtenu le prix Goncourt est une faute de goût. On le sait, ce prix n'a aucune valeur, ce n'est que magouilles et compagnie entre éditeurs par l'intermédiaire de leurs représentants dans le jury.
Il est ainsi de bon ton de dénigrer les primés dont on ne récompense pas le talent, mais celui de leur éditeur pendant les négociations (ah bon ? on dit délibérations ?). Et, pour couronner le tout, le prix fait vendre, beaucoup même, alors évidemment, ces écrivains deviennent nantis, pourris, n'écriront plus que de mauvais livres. Soyons donc snobs, ne lisons pas les Goncourt. Ou en cachette. C'est pourquoi je demande au jury d'épargner Marie NDiaye.
Modiano sous l'imper
Être fan c'est, quoi qu'il arrive, lire pratiquement tous les livres de l'écrivain, acheter le Magazine littéraire qui lui consacre un dossier. Je confirme : je suis fan de Patrick Modiano, enfin, de ses livres. Seulement, Monsieur Modiano a eu l'indélicatesse d'obtenir le prix Goncourt avant que je commence à le lire. J'use donc de toutes les techniques pour cacher mes lectures. J'utilise la carte d'abonnement de mes enfants quand j'emprunte un de ses livres à la médiathèque, et si j'achète le livre, je mets lunettes de soleil et imperméable et vais commettre une infidélité à mon libraire dans un lieu impersonnel : la Fnac. Et si la caissière saisit le livre trop longuement, si je la vois lire le nom de l'auteur, j'ajoute que c'est pour offrir, que tout le monde n'aime pas la littérature. Une fois rentré, je m'enferme et mets Le Baiser Modiano de Vincent Delerm pour lire le nouveau chapitre d’une œuvre faite d'absences, d'ellipses, de silences, une œuvre singulière et indispensable.
Le cas Echenoz
J'ai découvert Jean Echenoz avec Les Grandes Blondes. J'ai depuis tout lu de lui. Il dit de son œuvre qu'elle est géographique, ce qui est vrai quoique réducteur, car elle est aussi cinématographique (les transitions entre les chapitres, relire L'Équipée malaise) et musicale (quel rythme !). Et j'admire particulièrement son utilisation du futur, implacable. Et voilà qu'en 1999, Je m'en vais reçoit le prix Goncourt. Finies les discussions entres amateurs sur cet auteur à la limite du polar ; tout le monde s'est mis à lire notre Echenoz. J'ai donc adopté la même technique que pour Modiano, préférant néanmoins le jazz à Vincent Delerm, le rythme à la nostalgie.
Une femme puissante
Avec Marie NDiaye, je pensais avoir trouvé un écrivain digne de confiance. J'avais adoré La Sorcière. Cette intrusion du fantastique pour illustrer l'étrangeté des relations humaines, ces personnages vils, couards. Pour sûr, la maison de retraite de Drouant allait laisser NDiaye en paix. Que nenni !
Son dernier roman, Trois femmes puissantes, figure, à juste titre, parmi les favoris pour le Goncourt 2009. Seulement, à quoi bon décerner ce prix à un livre dont on annonce près de 150 000 exemplaires vendus ?
Bien entendu, être fan ne dispense pas de la critique, au contraire. J'apprécie moins le théâtre de NDiaye, notamment Puzzle, et ses nouvelles (clin d'œil à Magali).
J'en profite pour signaler le pastiche commis ici (j'annonce la traduction en anglais pour bientôt) et ma lecture versatile disponible depuis hier (merci Pierre).
Alors, ce Goncourt ?
Tiens, au hasard, pourquoi pas Minuit ? Dix ans déjà depuis Echenoz. Peut-être pas à Jean-Philippe Toussaint, qu’on lit beaucoup au Japon, on le garde pour un Nobel dans quelques années, alors Laurent Mauvignier ! Dans la foule a laissé des marques chez moi et les premières pages de son dernier livre, Des hommes m'ont paru prometteuses.
Au cas où, le jury me suivrait, et pour ne pas subir la colère de Marie NDiaye, je serai sous les tropiques (à défaut de littérature géographique, je donne dans la géographie) le 2 novembre à 12h45, heure de Paris.
Snob avant tout
Aimer un écrivain qui a obtenu le prix Goncourt est une faute de goût. On le sait, ce prix n'a aucune valeur, ce n'est que magouilles et compagnie entre éditeurs par l'intermédiaire de leurs représentants dans le jury.
Il est ainsi de bon ton de dénigrer les primés dont on ne récompense pas le talent, mais celui de leur éditeur pendant les négociations (ah bon ? on dit délibérations ?). Et, pour couronner le tout, le prix fait vendre, beaucoup même, alors évidemment, ces écrivains deviennent nantis, pourris, n'écriront plus que de mauvais livres. Soyons donc snobs, ne lisons pas les Goncourt. Ou en cachette. C'est pourquoi je demande au jury d'épargner Marie NDiaye.
Modiano sous l'imper
Être fan c'est, quoi qu'il arrive, lire pratiquement tous les livres de l'écrivain, acheter le Magazine littéraire qui lui consacre un dossier. Je confirme : je suis fan de Patrick Modiano, enfin, de ses livres. Seulement, Monsieur Modiano a eu l'indélicatesse d'obtenir le prix Goncourt avant que je commence à le lire. J'use donc de toutes les techniques pour cacher mes lectures. J'utilise la carte d'abonnement de mes enfants quand j'emprunte un de ses livres à la médiathèque, et si j'achète le livre, je mets lunettes de soleil et imperméable et vais commettre une infidélité à mon libraire dans un lieu impersonnel : la Fnac. Et si la caissière saisit le livre trop longuement, si je la vois lire le nom de l'auteur, j'ajoute que c'est pour offrir, que tout le monde n'aime pas la littérature. Une fois rentré, je m'enferme et mets Le Baiser Modiano de Vincent Delerm pour lire le nouveau chapitre d’une œuvre faite d'absences, d'ellipses, de silences, une œuvre singulière et indispensable.
Le cas Echenoz
J'ai découvert Jean Echenoz avec Les Grandes Blondes. J'ai depuis tout lu de lui. Il dit de son œuvre qu'elle est géographique, ce qui est vrai quoique réducteur, car elle est aussi cinématographique (les transitions entre les chapitres, relire L'Équipée malaise) et musicale (quel rythme !). Et j'admire particulièrement son utilisation du futur, implacable. Et voilà qu'en 1999, Je m'en vais reçoit le prix Goncourt. Finies les discussions entres amateurs sur cet auteur à la limite du polar ; tout le monde s'est mis à lire notre Echenoz. J'ai donc adopté la même technique que pour Modiano, préférant néanmoins le jazz à Vincent Delerm, le rythme à la nostalgie.
Une femme puissante
Avec Marie NDiaye, je pensais avoir trouvé un écrivain digne de confiance. J'avais adoré La Sorcière. Cette intrusion du fantastique pour illustrer l'étrangeté des relations humaines, ces personnages vils, couards. Pour sûr, la maison de retraite de Drouant allait laisser NDiaye en paix. Que nenni !
Son dernier roman, Trois femmes puissantes, figure, à juste titre, parmi les favoris pour le Goncourt 2009. Seulement, à quoi bon décerner ce prix à un livre dont on annonce près de 150 000 exemplaires vendus ?
Bien entendu, être fan ne dispense pas de la critique, au contraire. J'apprécie moins le théâtre de NDiaye, notamment Puzzle, et ses nouvelles (clin d'œil à Magali).
J'en profite pour signaler le pastiche commis ici (j'annonce la traduction en anglais pour bientôt) et ma lecture versatile disponible depuis hier (merci Pierre).
Alors, ce Goncourt ?
Tiens, au hasard, pourquoi pas Minuit ? Dix ans déjà depuis Echenoz. Peut-être pas à Jean-Philippe Toussaint, qu’on lit beaucoup au Japon, on le garde pour un Nobel dans quelques années, alors Laurent Mauvignier ! Dans la foule a laissé des marques chez moi et les premières pages de son dernier livre, Des hommes m'ont paru prometteuses.
Au cas où, le jury me suivrait, et pour ne pas subir la colère de Marie NDiaye, je serai sous les tropiques (à défaut de littérature géographique, je donne dans la géographie) le 2 novembre à 12h45, heure de Paris.
6 commentaires:
Quelle malédiction, mon pauvre Franck Ne dirait-on pas que dès que tu lis une oeuvre complète, l'auteur reçoit le prix Goncourt ? Alors, à ce propos, as-tu lu les livres suivants : Zéro, le Monde, Papier du sang, Femme vacante... Ne traine pas, je voudrais être fraîche encore pour recevoir ce prix tout pourri.
Désolé Frédérique, un jeune écrivain t'a devancée : je viens de recevoir par la poste l'intégrale A. Jardin. Accompagnée d'un gros chèque.
Le titre m'a fait peur car je suis encore éblouie par la beauté de Trois femmes puissantes... Mais votre chronique est délicieuse, et très drôle !
(Et c'est vrai que quand on y pense...)
Marie NDaye est programmée pour les jours qui viennent, je vais me dépécher afin d'éviter le suivisme goncoureux
Merci Zoridae, et attention Zoë, vous riquez le suivisme par anticipation...
Moi qui suis fan de Kessel ou Mailer (entre autres), je n'ai pas votre pouvoir, c'est évident.
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