Littérature et musique ce soir avec le recueil de nouvelles Tous nos petits morceaux d'Emmanuelle Urien et de I'll be your mirror du Velvet Underground (oui, encore).
Si les miroirs parlaient... Tous nos petits morceaux, publié en septembre 2010, a tout pour me plaire, un auteur au style précis, implacable, un excellent éditeur (on va finir par croire que j'ai des parts chez D'un noir si bleu ou que je voudrais qu'ils me publient, faux deux fois) et un thème, ici : le miroir.
Je pensais qu'Emmanuelle allait passer en revue toutes les déclinaisons du thème, explorer toutes les pistes, nous fournir un kaléidoscope de couleurs noire et grise, mais elle a appliqué à la lettre une méthode : faire parler des miroirs. Mises à part deux nouvelles, chaque texte fait littéralement parler un ou plusieurs miroirs. Ainsi, je suis déçu par Témoin spéculaire. Le miroir décrit une scène (certes forte, certes intolérable) seulement, qu'apporte-il à l'histoire ? Pourquoi pas un narrateur impersonnel ? Ici, je ne trouve pas l'intérêt de l'exercice de style, le miroir ne sert à rien.
Là où l'exercice devient intéressant, voire passionnant, c'est quand le miroir intervient réellement, devient personnage, comme c'est le cas avec Psyché et Thanatos. Je n'ai jamais lu de texte aussi fin sur le mal-être d'une ado, presque femme, le corps comme obsession, le genre d'obsessions qui mènent à l'anorexie ou la boulimie, comment accepter ce corps qui change, le regard des autres, et dans cette nouvelle on ne sait jamais si la perception de l'ado vient d'elle ou du miroir qui la parasite, et le psychologique et le fantastique se répondent dans une danse diabolique. De la belle ouvrage. Du Urien grand cru.
Ainsi, l'exercice de style s'éloigne à mesure que les miroirs deviennent personnages. C'est le cas évidemment avec le premier texte du recueil, Éclats de miroir, un véritable festival. Je connaissais déjà cette nouvelle qui a gagné nombre de concours jadis. D'habitude, je lis en dernier (ou pas du tout) les textes que je connais dans un recueil, mais j'avais tellement adoré celui-ci, que je me suis précipité pour le relire. Et cette chute, très Urien, imparable.
Autre exemple, ce dialogue dans Tentative réussie d'approche de l'infini entre deux miroirs d'un bar-PMU, deux narrateurs pour une même scène (un couple assis à une table), rai de lumière positive dans le noir habituel de l'auteur. Elle inverse ici les rôles, les miroirs sont les personnages alors que le couple devient le sujet de leur conversation.
Et puis, il y a Le jeu du miroir, le dernier texte. Les recueils d'Emmanuelle Urien sont les seuls que je lise en respectant l'ordre des nouvelles. Parfois, je saute un texte si je le connais déjà, mais en général je lis dans l'ordre. Parce qu'elle sait donner le ton de ses recueils avec le premier texte et qu'elle me cueille avec le dernier. Et celui-ci, très fort, à plusieurs chutes, referme parfaitement le recueil.
Je ne suis pas déçu, je m'attendais juste à autre chose. Malgré tout, Emmanuelle Urien parvient à se détacher de l'exercice un peu artificiel pour retrouver son propre style. Je ne sais si ce thème était pour elle un pari qu'elle a relevé, une volonté de fédérer des textes sur un thème précis qui lui importe, un moyen d'écrire autrement un recueil, un besoin de contrainte pour écrire de nouveaux textes, mais ce qui en résulte, c'est encore un recueil au-dessus de la mêlée.
L'homme regarde le miroir, le miroir regarde l'homme peut-on lire en exergue du recueil (citation de Koan Zen). Ça colle parfaitement au recueil d'Emmanuelle. Je lui avais proposé I'll be your mirror, reflect what you are, in case you don't know de Lou Reed, tout de suite plus prétentieux. Et voilà la transition !
The style it takes Cette chanson du Velvet Underground, I'll be your mirror me hante depuis 20 ans. Peut-être parce qu'on peut tout dire du miroir. Le texte, simple, permet plusieurs niveaux de lecture. Lou Reed a écrit une chanson d'amour, mais le texte peut aussi dire l'amitié, le travail d'un artiste lorsqu'il souhaite décrire le monde, tel qu'il est, tel qu'il devrait être.
Cette chanson, je l'ai jouée et chantée sûrement des centaines de fois, seul ou en groupe, à la basse, à la guitare ou au piano, en salle de répète sous la cafète de l'IUT du Havre au salon confortable de ma maison aujourd'hui. Et à chaque fois que je la chante, bien ou mal, c'est comme retrouver un ami, les accords viennent instantanément (faut dire qu'il n'y a en que 3 et demi), les mots aussi.
Et comme toujours, comme avec Satie, comme avec les pastiches (vous voyez, je suis cohérent parfois, comme garçon), j'ai toujours voulu comprendre pourquoi elle m'attirait tant, et comment Lou Reed l'avait écrite. Pasticher Satie, par exemple, c'est mettre un peu de soi pour créer avec le style d'un autre. Là, l'exercice est différent, j'ai décidé de prendre la chanson et de la tordre dans tous les sens. Trouver un arrangement au piano, ou partir de la version soft initiale pour y claquer des accords avec une fureur grunge, ou moduler le chant quitte à légèrement changer la mélodie. Et miracle, elle tient toujours debout.
C'est la leçon de l'écriture de Lou Reed, la simplicité. Pas besoin d'effets, de tonnes de violons, de solos endiablés, la chanson tient. Pour la littérature, je pense qu'il doit en être de même. Virer le gras. Virer les personnages inutiles, les adverbes racoleurs, les lourdes subordonnées, le vocabulaire ampoulé. Et le moyen d'y parvenir, pour moi, c'est la nouvelle, le texte court.
Le ridicule n'a jamais tué, surtout moi, j'ose tout (c'est à ça qu'on les reconnaît, il paraît). Alors, je vous livre ce soir trois versions de I'll be your mirror, j'en prépare d'autres, mais je vous épargnerai la totale, n'ayez crainte.
La première a 20 ans, mon âge à l'époque. En trio : Laurent Guiod à la batterie, Benoît Castellot à la basse et votre serviteur à la guitare et au chant. L'arrangement est de Benoît. Conditions d'enregistrement : magnéto K7 au centre de la pièce (une cave sous la cafète de l'IUT du Havre, vous avez suivi).
Si je vous conseille la lecture de l'epub, ce n'est pas pour mes talents de photographe, je connais mes limites, mais c'est avant tout pour la poésie de Christine et la qualité de bon nombre de photos.
Dans ma todo liste perso, il y a deux projets qui commencent à prendre forme, qui mêleront musique et littérature, et qui subiront un coup d'accélérateur quand je donnerai les clefs des 807. 2012 s'annonce créatif.
todo liste, 171
– ce moment où : tu t'ébouriffes un peu, tu te masses le cou, tu orientes la lampe, le maquillage, un trait de bleu qui a coulé, le réécrire, l'estompe du noir à accentuer, les cils sombres comme tu le veux, rire quand l'autre passe, on se congratule mais le rétablissement à la dernière seconde, quel frisson, tu as caché l'hésitation sous une maladresse comique, on s'en est bien sorti cette fois
– ce moment où : la pénombre, le rideau, les coulisses, l'isolement, au dedans, soi dans l'obscur, se deviner, s'espérer, s'attendre, se chercher fébrile comme on retourne en trombe le contenu fou d'un tiroir
– ce moment où : tu te rassembles, chaque muscle en toi retrouve sa place, sa tension juste, tu es une mécanique huilée, une boule parfaite, parfaite sphère qui va se déployer dans toutes les directions, tu as confiance, malgré cela tu trembles
– ce moment où : arrive le lever, debout, la pénombre, le rideau, la lumière crue, à l'intérieur tu hurles que tu n'as pas peur, bravache, tomber ou s'envoler, les deux mon général, tu respires, mais tu voudrais qu'avant, d'un doigt seulement, on te caresse la joue, quelqu'un
todo liste, 208
– ah ! le gratin de chx fleuy, j'adore ça
– vous m'en mettrez trois tripotées, ma bonn'dame, avec un kilo de scr et ce sera tout
– vous n'êtes pas très causante par contre, malgré l'accorte face qui vous caractérise, êtes-vous sûre que ça va ?
– et là, elle ôte ses mains de bois qu'elle enlève comme des gants, pose sa tête sur la table avec un grand soupir, saisit la chaise et s'y assoit, cette fatigue qu'elle a, elle commence à parler, à parler, ça fait un grand tapage, les passants dans la rue s'arrêtent pour l'écouter, aucun n'ose l'interrompre, et même encore maintenant, dans cette rue-là, les gens y pensent, parfois ils s'interpellent, ils se disent (pas trop fort, avec des airs pudiques) Tu te souviens du jour ? et de ce qu'elle a dit ? et puis ils hochent la tête (là des airs entendus), ils se souviennent, et même très bien, de quand la femme de bois a égrené sa peine en vidant sa caboche et du monceau de plaies qu'elle a mis sur la table, et comme c'était grotesque et touchant à la fois
publie.net, le laboratoire de la littérature numérique, vient de sortir la saison 2 des 807 en epub, 512 pages pour 3,99 euros (cliquez ici ou sur la couverture). Je n'ai pas vérifié, n'ayant pas encore d'iPad, mais il doit même y avoir du son.
Pendant ce temps, la saison 3 continue, jusqu'au 21 avril 2012. Il reste encore 60 places pour vos propositions. Ensuite, advienne que pourra car j'ai décidé de passer la main. Je suis prêt à donner les clefs au plus offrant. Je reprends l'annonce ici :
Le taulier jette l'éponge ! Offre d'emploi : Propose CDI de taulier des 807 à partir d'avril 2012. Rémunération nulle, travail conséquent. Une expérience d'édition ou de correction littéraires serait un plus. On peut trouver une description plus détaillée du poste ici. Notez qu'il n'est pas nécessaire d'aller à Bangkok ou Chişinău pour obtenir le poste. Adressez votre candidature au taulier lâcheur.
Et puisqu'il est question de mon 100e 807 (en lien dans l'annonce Pôle emploi), sachez que vous pouvez en écouter la lecture depuis ce matin dans le café Calipso à l'occasion du 807e post. Lecture par l'auteur, accompagné au piano avec une impro du même monsieur.
Je vous conseille la fréquentation de ce café, d'ailleurs j'y passerai tous les dimanches à l'occasion des 100 derniers jours avant l'élection de notre président. Je parle rarement politique, alors j'en ai profité pour n'en point parler davantage.
En octobre, je publiais ici mon pastiche de la Chanson d'automne de Verlaine. Et j'appelais les pasticheurs à continuer les saisons, à terminer le travail inachevé du Prince des poètes. Le résultat va au-delà de mes espérances car au final ce ne sont pas 4 mais 5 saisons chantées en 4+4+3, grâce à l'une des saisons d'Imrie.
Je remercie Magali, Sylvie et Joachim d'avoir répondu à l'appel, et pour vous, voici donc le florilège de Chansons qu'on peut retrouver sur pastiches.net.
Chanson d'automne
Les sanglots longs Des violons De l’automne Blessent mon cœur D’une langueur Monotone.
Tout suffocant Et blême, quand Sonne l’heure, Je me souviens Des jours anciens Et je pleure ;
Et je m’en vais Au vent mauvais Qui m’emporte Deçà, delà, Pareil à la Feuille morte.
Paul Verlaine
Chanson d’hiver
Le linceul blanc D’un hiver lent Abandonne La fleur de givre Au carreau ivre Qui s’étonne.
Auprès du feu Mon ventre creux S’engourdit, Tant pis pour celle Qui fut ma belle, Je l’oublie ;
Et je m’endors Bercé par l’or Des tisons, Quand ils crépitent J’entends la fuite Des saisons.
Sylvie Lainé
Chanson de printemps
Les rires clairs Flottent dans l'air Du printemps Gonflant mon cœur D'une vigueur De vingt ans.
Monte la sève Tandis que rêve Mon amant ; Je me souviens Des jeux anciens Et je mens ;
Et je me sauve À pas de fauve Pourchasser Ici et là Une belle à Embrasser.
Franck Garot
Chanson d’été
Le doux refrain Du slow sans fin De l’été Berçait nos corps De ses accords Répétés.
Tout transpirant Et rouge, quand Il s’achève, J’arrive à prendre Tes lèvres tendres C’est le rêve.
Et nous partons Vers ton futon Pour, tout nus, Danser le feu D’un pas de deux Inconnu.
Magali D.
Chanson d’hirtémone
La pluie dardée De l’embardée D’hirtémone Givre mes dents D’un cri ardent De crémone.
Tout en pêchant Des fleurs le chant De berceuse, Je sens, salin, Un froid vilain De perceuse.
Mon sang laqué, Je suis traqué, Quand s’amorce, En éclatant, Le feu suintant Des écorces.
Noël approche et vous avez sûrement des amis qui jouent au poker. Veinards, voici l’idée de cadeau idéal.
De quoi qu’on parle ? Ça commence comme ça :
Vous avez longé la plage de Barceloneta jusqu’au Gran Casino pour jouer un side event de l’EPT à 1 100 €. Vous êtes Soren, la tête encore emplie des beats de LCD Soundsystem que vous avez vu la veille au Razzmatazz, la mythique salle de concert de Barcelone. Vous avez passé la semaine chez votre frère qui s’est installé dans la capitale catalane depuis quelques années. Les tribulations du groupe new-yorkais raisonnent dans votre crâne comme une promesse non tenue, celle de se préparer sagement avant un grand événement, reposé. Bref... Vous descendez à présent le grand escalier qui mène à l’arène, immense, où le bruit des jetons se mêle aux cris des lutteurs. Vos yeux, une fois habitués aux lumières vives et à la décoration clinquante, se mettent à pétiller. Les pros affluent de toute part. Elky, l’un des plus médiatiques, rôde à proximité. Il accepte gentiment de poser en photo. À 29 ans, vous retrouvez une âme de midinette.
Quittons Barcelone, nous voici quelques semaines plus tard à Vienne :
Décembre glacial à Vienne, un couple descend tranquillement la rue Herrengasse quasi déserte, sans prêter la moindre attention aux palais qui la bordent. Les lampadaires et les décorations de Noël bavent une lumière pisseuse sur des flaques d’eau qui virent doucement à la glace. Elle lui a demandé cette promenade malgré le froid, en sortant du Café Central où ils venaient de dîner malgré les touristes. Quelques pas avant de rejoindre leur hôtel. Ils ne s’enlacent pas, ni même ne se tiennent par la main. Ce couple, c’est Siyah et moi. Nous sommes jeudi, je l’ai rejointe ici aujourd’hui directement de Toulouse. Elle participe à l’étape autrichienne du 3 Länder Poker Tour avant l’EPT de Prague la semaine prochaine. Gwen viendra demain, de Paris, il voulait vérifier si sa Mustang était aussi rapide sur le trajet Toulouse-Paris que Paris-Toulouse. Je n’ai rien pu savoir de la vie de Siyah pendant le dîner. Je ne connais d’elle que ce que j’ai pu glaner sur les sites de poker, rien de plus. En revanche, elle a réussi à me faire parler, elle sait tout : mon ancien boulot de consultant, mon ambition de devenir un joueur pro peut-être un jour, mes histoires de famille, mais surtout, que je suis célibataire. Je profite du calme viennois pour en savoir plus sur ses relations avec le Breton.
Vous venez de lire deux passages de Poker is War, livre que j’ai coécrit avec Yann Le Dréau et Alexis Beuve. Mais ne vous y trompez pas, ce n’est pas un roman ! C’est avant tout un traité de poker, sûrement le plus ambitieux des livres de poker en français. Pour vous en rendre compte lisez plutôt les extraits techniques sur le site de l’éditeur.
Pourquoi moi ? Ce n’est bien sûr pas pour mes compétences pokéristiques que les duettistes m’ont recruté pour ce projet. Ils voulaient que chaque leçon se passe dans un lieu différent, plus ou moins lié au sujet, des personnages qui évolueraient, une intrigue, un dialogue continu. Ils ont pensé que je pourrais les aider, ce que j’ai certes beaucoup fait au début, beaucoup moins sur la fin car les deux compères ont progressé.
Ce fut ma première expérience de coécriture, j’avais déjà corrigé des livres Praxeo (jeu de go, poker...), mais jamais je ne m’étais impliqué ainsi, sur un an. Et le résultat est à la hauteur des ambitions affichées par Yann et Praxeo. Les lecteurs sont ravis (notamment le premier d’entre eux).
Bien entendu chacun a apporté ses connaissances, ses centres d’intérêts, ses expériences, côté musique, dans Poker is War on écoute Satie, LCD Soundsystem, Thin lizzy, pour les lieux on voyage à Istanbul, Penmarc’h, Malte, etc. Écrire à trois permet l’effervescence d’idées qu’il faut ensuite canaliser et ordonner pour publier un livre qui tienne la route. Des discussions interminables, des chapitres à récrire entièrement. Tout ceci est extrêmement enrichissant (je suis incollable sur les opérations Silver et Gold pour avoir visionné pendant des nuits des interviews des protagonistes, je sais à quoi ressemble la gare maritime de Büyükada, qu’un train entre Prague et Vienne peut s’appeler Klimt, Mahler, Dvořák...), mais j’ai dû mettre entre parenthèses d’autres projets, purement littéraires ceux-là. Voilà pourquoi je ne suis pas prêt de recommencer un tel projet.
Deuxième trio Enfin, cette présentation ne serait pas complète si je ne parlais d’Ivan Seisen ! Ivan a illustré l’ouvrage avec de nombreux dessins drôles qui permettent une saine aération. Il a travaillé avec Yann et Alexis ; je ne l’ai rencontré qu’à la soirée de lancement du livre au club Montmartre Hold’em (excellent club, excellent accueil). Un petit exemple du talent d’Ivan avec cet humour de joueur de poker.
Ça sent le sapin ! Le livre vaut 59 euros, fait 608 pages, et en plus d’être bon, il est beau. Alors n’hésitez pas à l’offrir, les joueurs savent déjà que l’investissement est « grave EV+ ». Et ça tombe bien : le 11 décembre 2011, Praxeo investit l’AS Vegas à Paris.
La dream team photographiée par Rodolphe Engel (de g. à d.) : Franck Garot, Yann le Dréau, Alexis Beuve, Ivan Seisen.
Christine Jeanney que l'on peut retrouver sur les 807 et sur son site tentatives, en plus des publications en papier ou en numérique propose chaque jour une liste de quatre choses à faire sur photo offerte, le tout à lire et à regarder sur toto liste. La proposition étant séduisante, je lui ai envoyé deux photos. Voici le résultat (photos de votre serviteur et textes de Christine Jeanney).
toto liste, 73
– penser tout jeter avec les larmes
– danser de joie mais sans danser, parce que pendant qu'on bouge on ne voit pas les flammèches, le bleu fumé, l'orange, la soie de l'orange filée et la braise
– penser des tas de petites bêtes terrorisées, surtout celles qui ne vivent qu'un jour et ne se souviennent pas de Londres
– se dire que dans quelques heures ce sera froid, gris, poussiéreux, intéressant, qu'un détective anglais en tirera des enseignements, saura combien de temps on a dansé de joie sans danser et ce qu'on a jeté, le nombre de larmes exactes qui auront roulé sur les braises, le petit bruit qu'elles auront fait en se recroquevillant, leur fin de vapeur ou de feu d'artifice minuscule
toto liste, 134
– la première chose à faire : compter les branches (plus de 800 mais à peine plus), compter les feuilles visibles (plusieurs centaines et sept unités, forcément)
– cet être hybride sur la pointe des pieds, difficile pour lui de s'orienter, de manipuler sa tête lourde qu'il doit poser au sol pour respirer, puis il produit un cliquetis en forme de respiration ou de soulagement, peut-être cet endroit propice
– sa tête lourde, dans sa tête une boîte noire qu'il comble (car il abhorre le vide) d'arbres à l'envers, de perspectives, de cloches (trois), marrons et cornettes bicolores, bogues écrasées maladroitement, kleenex, capsules, canettes sucrées, sapins déprime, accents anglais, drapeaux germains, foule de pensées non explicites
– le lendemain au même endroit, il n'y est plus (cette espèce migre, furtive)
Ce soir, nous éclairons les coulisses des 807 et annonçons une bonne nouvelle.
Les 807 côté coulisses Je viens de publier mon 100e 807. J'ai profité de ce texte pour parler de cette expérience du point de vue du taulier. Je le reproduis ici. Ceci dit, malgré le titre de ce 807, ça continue, et les propositions sont toujours les bienvenues.
C'était les 807
C'était chaque jour vérifier la messagerie du blog, puis une seconde, voire celle de Facebook, car les contributions venaient de toutes parts. C'était lire, relire, accepter, refuser, corriger, traduire, parfois récrire. C'était répondre à tous, toujours. C'était aussi échanger, donner et recevoir, parler style, règles. C'était découvrir de nouvelles voix, de nouveaux horizons, de nouveaux projets. C'était faire des erreurs, sûrement. Mais c'était aussi rencontrer certaines de ces voix dans le réel, pour un déjeuner, un événement. C'était se dire qu'on ne respirait plus, qu'il fallait arrêter, et on arrêtait, et on recommençait, différemment, certes, mais on recommençait tout de même, et on arrêtait de nouveau, pour mieux recommencer. C'était se demander pourquoi cette addiction, pourquoi perdre un temps précieux parce que rare, se dire néanmoins qu'on continuait d'apprendre. C'était annoncer le programme, les changements, les suspensions faute de propositions, faute de temps. C'était voir les jours passer et le stock diminuer, jusqu'à écrire à la dernière minute pour que le flux continue. C'était retravailler des images pour qu'elles rentrent en 520 de large, trouver un lecteur pour écouter le son. C'était composer de la musique, l'enregistrer. C'était prendre des photos qu'on utiliserait et qu'on n'utilisera jamais. C'était se connecter à l'interface du blog, de la maison, de New York, Londres, Bangkok, Chişinău... C'était corriger après publication des fautes de participe passé qu'on avait oublié voire oubliées, ou régler un problème de programmation, l'objet publié trop tôt ou trop tard. C'était tenter de nouvelles choses, sur le fond, sur la forme, tenter des pastiches comme celui-ci, maquiller des fêlures et les donner à lire, ou au contraire inventer une histoire. C'était publier un livre, puis en préparer un deuxième. C'était envisager une lecture publique. C'était accepter tout le monde, du moment qu'il ait quelque chose à dire, sans aucune discrimination quelle qu'elle soit. C'était rester seul maître à bord, taulier malgré soi, assumer ses choix, ses erreurs. C'était certains jours haïr ce nombre, violemment, le considérer comme un triple six. C'était s'étonner que ça tienne toujours, que ça intéresse encore, ne pas comprendre ce que ça signifie, et se demander jusqu'où ça irait dans l'hypothèse improbable que ce chemin mène quelque part. C'était enfin ne pas savoir comment remercier chacun, participant ou lecteur.
C'était mon 100e.
C'était un pastiche Le texte que vous venez de lire est un pastiche du C'était de mon comparse de pastiches.net, Joachim Séné. Je vous ai déjà parlé de ce projet en janvier : C'était les Glossos. Je ne redirai pas une nouvelle fois le bien que j'en pense, mon pastiche s'en chargera aujourd'hui. Mais il me faut vous annoncer que publie.net (évidemment) a décidé de publier le texte en epub. Vous le trouverez en cliquant sur l'image ou sur ce lien. Et ceux qui n'ont pas encore de liseuse ou de tablette pour lire un fichier epub peuvent se réjouir de l'existence de logiciels tels l'add-on EPUBReader 1.4.1.0 que j'utilise pour Firefox. Bien sûr, depuis mon article de janvier et de la première version du texte en pdf, Joachim a continué l'écriture pour que l'année s'achève et qu'elle recommence, identique à la précédente.
Vous trouverez sur ce blog des informations inestimables sur mon exceptionnelle carrière littéraire. Et pour appâter le chaland, quelques nouvelles et textes courts, inédits ou déjà publiés en revue ou sur des blogs littéraires amis. As I'm famous worldwide, I've also published a selection of texts in English. Les publications sont irrégulières mais avec une forte tendance pour le dimanche vers minuit. Bien entendu, tous droits réservés. Bonne lecture ! Franck Garot